Qu’est-ce qu’être un bon parent pour Jérémy Charbonnel

Qu’est-ce qu’être un bon parent ? C’est la question que se pose, souvent avec tendresse et lucidité, l’humoriste Jérémy Charbonnel.
Dans ce nouvel épisode de la série De l’enfant aux parents, il se confie à Stéphanie d’Esclaibes sur ce qui fonde, selon lui, une parentalité consciente et apaisée : la capacité à se connaître soi-même.

À travers son spectacle Seul tout et ses vidéos pleines d’humour à retrouver sur son compte Instagram, Jérémy Charbonnel explore avec sincérité les traces de l’enfance, les blessures qui façonnent les adultes que nous devenons, et la façon dont elles influencent notre rôle de père ou de mère.

Pour lui, la parentalité commence par soi — un message à la fois intime et universel, qui résonne avec toutes celles et ceux qui cherchent à mieux comprendre leurs enfants en se reconnectant à l’enfant qu’ils ont été.
NB : Cette interview écrite est recomposée à partir des propos exacts de Jérémy Charbonnel. 

Ton spectacle évoque beaucoup ton enfance. En quoi ton histoire d’enfant influence-t-elle ta façon d’être père aujourd’hui ?

Jérémy Charbonnel a grandi dans une famille qu'il qualifie régulièrement de bourgeoise.

« C'est rare un stand-uper qui vient de Saint-Cyr-aux-Mont d’Or, qui est une banlieue un peu chic de Lyon. J'ai grandi dans un petit cocon où tout était beau, où tout était merveilleux, où je n'avais, je dirais, aucun manque matériel.
Mais ce n'est pas parce qu'on a ça qu'il ne manque pas peut-être l'essentiel :  c'est peut-être de l'attention, de la présence psychologique.

Et puis, il y a cette cassure où je saute le CP. Là, c'est le début du trauma. D'un coup, l'école n'est plus du tout un plaisir. Et je n'ai jamais eu de plaisir à apprendre. Ça m'amenait à ce truc de « En fait, tu n'es pas bon. Donc, tu vas décevoir. Donc, tu n'es plus parfait. Donc, il faut cacher ça. » Le cercle vicieux, il est terrible.

Mes parents étaient là sans être là. Malheureusement, parce qu'ils n'étaient pas disponibles émotionnellement pour ressentir à quel point ça pouvait être violent. C'est tout le travail que je mène avec ma psychologue et mon préparateur mental qui me permet de comprendre ces ressorts.

J'ai l'impression que j'ai grandi dans une famille où le travail était du labeur, c'était de la souffrance. Et le plaisir pouvait faire penser que tu ne faisais pas ton travail avec sérieux. Aujourd'hui, j'essaye d'avoir du plaisir dans ce que je fais et de transmettre ça à mon fils, de faire ça dans le plaisir : la performance par le plaisir. »

Tu t’es séparé alors que ton fils était encore petit. Comment as-tu vécu cette épreuve, et quelles étaient tes peurs vis-à-vis de lui ?

« Souvent, quand on devient parent, on ne sait pas dans quoi on met les pieds. Et je pense que moi, j'étais encore un enfant quand je suis devenu père.

Je pense qu'il y avait aussi beaucoup d'ignorance et d'insouciance sur les conséquences. Il y avait chez moi quelque chose d'un enfant complètement perdu. Je sais à quel point j’ai pu faire souffrir la mère de mon fils. J’ai mis du temps à comprendre certaines choses, à assumer mes erreurs.

Je ne sais pas si j'ai pensé aux conséquences, mais ma psy m'avait sorti cette phrase : il vaut mieux deux parents heureux séparés que deux parents ensemble malheureux. Et je sais que j'étais malheureux, mais pas à cause de la mère de mon fils, à cause de plein de choses, à cause de beaucoup de manques, à cause de liens d'attachement totalement insécures.

J'avais eu un sentiment de devoir me sauver, moi, parce que j'étais en perdition. Alors qu'on le dit, c'est le plus beau moment de ta vie, tu as un enfant, tu dois être super heureux, tu le fais avec la femme que tu aimes. Et là, il y avait trop de choses en moi qui me débordaient. Et je pense que j'ai été submergé des émotions et je pense qu'à ce moment-là, je me suis dit, waouh, va falloir commencer à comprendre un peu : on va gérer toutes ces émotions parce que le trop-plein a fait que, je pense, j'ai disjoncté et que j'ai tout envoyé balader.

Il faut assumer d'avoir fait ça. Et le plus important, c'était que mon fils ne manque pas de sécurité émotionnelle. Je pense qu'il a vécu quelque chose, une scission, ça a été très dur pour la mère de mon fils, pour moi aussi, et dans cette adaptation d'agenda, de calendrier, de comment on gère...

J'aimerais un jour pouvoir peut-être aborder ce sujet avec lui pour qu'il puisse, si tant est qu'il ait ressenti des choses, les exprimer parce que c'est peut-être là, pour le coup, dans un inconscient très lointain. Et il va peut-être falloir qu'à un moment donné, il aille aussi parler.

Ça m’a obligé à grandir, oui. J’ai disjoncté, clairement. Il a fallu que je commence à comprendre, à me poser, à apprendre à gérer toutes ces émotions que je n’avais jamais vraiment comprises avant. »

Tu assumes publiquement avoir fait une thérapie. Ce travail thérapeutique t’a beaucoup transformé. Qu’est-ce que tu as découvert sur toi à travers cette démarche, et pourquoi trouves-tu important d’en parler ouvertement ?

« J'ai touché le fond et je pense qu’il faut parfois passer par là pour comprendre certaines choses.

J'ai eu envie de comprendre. Je me dévalorisais vachement. Je savais que j'étais une mauvaise personne, un mec horrible et je me disais : «bon, allez, on va bien creuser, on va continuer à creuser, on va bien voir que t'es nul, nul, nul, nul ».

Et il y a eu un travail avec une première psy, puis un travail avec une seconde psy qui m'a aussi beaucoup aidé pour comprendre  que je m'étais enfermé dans un cercle vicieux de « je suis nul, je suis une mauvaise personne, aime-moi, aime-moi, aime-moi, etc. ». 

Parce qu'il n'y a pas de honte à aller voir un psy. Nos parents étaient d'une génération où si on allait voir un psy, on était fou.  Or, au contraire, ce n'est pas parce qu'n ne va pas bien, c'est peut-être parce qu'on veut aller mieux.

On peut opposer cette quête de vouloir être parfait. Et je le dis souvent aujorud'hui, c'est non pas d'être parfait, mais juste d'essayer de faire un peu mieux chaque jour. Il n'y a pas de quête de perfection là-dedans. Au contre. Parce que si je voualsi être parfait, je ne ferais pas ça. Je ferais tout en mode « j'ai une belle maison, j'ai une belle voitrure, j'ai un enfant qui est beau, qui est bien-aimé, je vais très bien ».

Et du coup, forcément, une situation de séparation comme je l'ai vécue t'amène à te poser des questions, à faire un travail à la fois pour toi et un peu au-dessus, parce que t'as quand même été élevé par deux personnes qui, eux aussi, ont été des enfants. Faut pas l'oublier. Et je rêverais, je le dis souvent, d'être une petite mouche et de voir comment mes parents ont été élevés par leurs propres parents, dans une génération d'après-guerre. Voilà, j'aurais aimé voir les mots employés, j'aurais aimé voir les douceurs ou pas, les marques d'affection, s'il y en avait ou pas, parce que ça nous construit.

On parle des transmissions, je parle beaucoup des transmissions générationnelles, j'y crois beaucoup, et j'aimerais bien savoir, eux aussi, ce qu'ils ont eu, parce qu'on a des choses qu'on ne sait pas, mais on a ça en nous, ces transmissions. On commence à comprendre que ces petits traumas psychologiques ont des impacts beaucoup plus importants que ça en a l'air.

Et ça, il faut en parler. Parce que, on peut pas laisser faire. C'est pas parce qu'on est parent qu'on peut tout faire avec son enfant. Il y a une forme de responsabilité et pour ça, il faut se poser les bonnes questions. Parce que on peut reproduire de manière inconsciente ce qu'on a eu en tant qu'enfant. Et je sais que , il y a un truc, voilà, on parle souvent de la violence éducative ordinaire, et ça, il faut en parler beaucoup plus. Parce que on se rend pas compte à quel point une humiliation peut faire du mal. À quel point crier sur un enfant peut... Voilà. J'allais dire le management par la peur, mais l'éducation par la peur. C'est pas possible. »

Pourquoi est-ce essentiel, selon toi, de « se connaître un minimum » quand on devient parent, et qu’est-ce que cela change concrètement dans ta façon d’éduquer ? On sent que dans votre relation, il y a quand même beaucoup de joie et de sincérité.

« On essaye, oui. Oui, c'est vraiment le travail que je fais avec la psy, mais même aussi avec mon prépa mental, parce que être dans le plaisir, on oublie le plaisir. C'est quand même fou. Aujourd'hui, tout doit être travail. C'est pas parce que tu es dans la joie que tu ne fais pas sérieusement. Enfin, tu vois, il y a une toute petite nuance là-dedans où je pense que ça peut changer les choses. On parle de santé mentale parce que la performance était au-dessus de tout. Mais en fait non, le chemin est le plus important que l'arrivée.

Et dans la parentalité, bien sûr qu'il y a des moments difficiles. Et encore, moi je n'ai qu'un enfant. Il y a des gens qui en ont deux, trois.  Mais l'important, si on a choisi de le faire, c'est qu'à un moment donné, il faut aussi s'engager pleinement.

C'est pas parce qu'on est parent qu'on peut tout faire avec son enfant. Il y a une forme de responsabilité et pour ça, il faut se poser les bonnes questions. Parce que on peut reproduire de manière inconsciente ce qu'on a eu en tant qu'enfant. On parle souvent de la violence éducative ordinaire, et ça, il faut en parler beaucoup plus. Parce que on se rend pas compte à quel point une humiliation peut faire du mal. L'éducation par la peur, ce n'est pas possible. 

Et le problème, c'est que, d'un autre côté, toute cette éducation positive est totalement décriée parce que c'est l'entre-deux. C'est ce truc de nuance, de mettre un cadre, mais avec beaucoup de bienveillance. Et le cadre, t'as pas besoin de gueuler normalement. Mais, encore une fois, je n'ai qu'un enfant, et je sais pas ce que c'est quand on a deux, trois, et puis je l'ai une semaine sur deux.

Je pense que de travailler sur soi, déjà, il y a un bel avantage pour élever son enfant, parce qu'on nettoie pas mal de choses du passé, quand même. La première responsabilité en tant que parent, c'est de se connaître un minimum pour éviter de retransmettre nos petits traumas et ce qu'on a reçu du passé. »

Où places-tu la limite, en tant qu’humoriste et père, entre l’humour sur nos enfants et la moquerie, et quel rôle joue « l’enfant intérieur » dans cette frontière ?

« Aujourd'hui, il y a plein de blagues qu'on ne peut plus faire sur des questions féministes, la transphobie, les queers, etc., et c'est intéressant parce qu'aujourd'hui, on s'interdit de dire des choses là, mais on va continuer à se moquer des enfants. Et peut-être qu'il y a quelque chose à réfléchir là-dessus pour, dans l'inconscient collectif, peut-être prendre un peu plus soin d'abord de son enfant intérieur pour prendre soin de ses enfants. Parce que si on arrête de dire certaines choses, parce que c'est vrai, ça blesse, pourquoi continue-t-on avec nos enfants ?

La frontière, entre l'humour sur nos enfants et ce qui relèverait plus de la moquerie, ça va du coup peut-être être l'amour que tu vas porter à ton enfant. Bien évidemment, on aime tous nos enfants, mais je parle plus de notre enfant intérieur, qui est parfois blessé. En se moquant de nos enfants pour faire rire, c'est comme si, parfois, on venait se venger de cet enfant intérieur blessé sur l'autre enfant. On fait une projection de ce qu'on a reçu.

Ma psy me dit souvent ça :  si on câline notre enfant intérieur, si on lui fait un câlin, si on en prend soin, directement, on prend soin aussi de notre enfant, le vrai, enfin, celui qui est notre fils, quoi. Notre enfant. »

Dans tes vidéos, tu te mets souvent à hauteur d’enfant. Quelle est ta philosophie éducative aujourd’hui ?

« Première priorité, des liens d'attachement sécure. Voilà, déjà. Donc ça passe par mes liens d'attachement sécure avec lui, lui montrer qu'il y a un amour inconditionnel, que quoi qu'il fasse, je vais l'aimer. Il y a des choses qui me déplaisent, on en discute. Mais à chaque fois, dans chaque discussion au sujet de situations qui m'ont rendu dingue, je dis : « je t'aime et ça, ça ne changera jamais. Mais par contre, ça, ça, moi, je ne le veux pas dans ma maison. Ce n'est pas possible. Je comprends qu'il y a une frustration peut-être de quelque chose, voilà, explique-moi, mais ce n'est pas possible. Mais je t'aime, ça ne changera pas ». Donc déjà, un lien affectif sécure le plus important. 

Ensuite, qu'il ait envie d'oser, je le dis dans le spectacle, qu'il ose faire des choses, qu'il n'ait pas peur. Moi, souvent, j'ai cru que ce que j'allais rater, et que ça allait changer la valeur de qui j'étais. Puisque je rate, les gens vont se dire : « ah, il est nul, il n'est pas une bonne personne ». Alors que ça n'a rien à voir. Quand on joue aux jeux, il n'aime pas perdre. Mais ça fait écho à moi, j'étais très mauvais perdant petit, donc je sais ce qu'il vit. Du coup, je vais adapter mon discours, je dis : «  je sais ce que tu vis, je l'ai vécu. C'est compliqué ».

Moi, quand j'étais enfant, on me laissait gagner au jeu. Et j'ai découvert avec ma psy qu'en laissant gagner au jeu, j'avais une très mauvaise valeur de moi. C'est-à-dire que, comme je savais que les gens me laissaient gagner, quand on me faisait un retour positif, je pensais que les gens me faisaient ça pour me faire plaisir.

Ma psy me disait : « mais qui écoutez-vous vraiment dans votre famille ? » Il y en a un, c'est mon frère aîné, qui lui, il est vrai, ne m'a jamais laissé gagner au jeu. Lui, il s'énervait. Je me rappelle, on jouait au basket et moi, je commençais à m'énerver. Il me jetait le ballon, il me disait « tu me saoules, je me casse ». Et du coup, sa parole a un vrai poids pour moi.

Quand on joue à des jeux de hasard, de chance, comme le cochon qui rit, je dis deux choses à mon fils :

- Que tu gagnes ou que tu perdes, ça ne change pas la valeur de qui tu es. Tu seras mon fils, je t'aimerai quoi qu'il arrive. Tu ne seras pas meilleur, moins bien.
- Ose en prenant du plaisir. Et parfois, je le vois, il s'agace. Par exemple, il désire un as et l'as ne sort pas. Je lui dis alors : « tu es trop sur l'objectif de l'as. Prends du plaisir. Prends le dé, lance-le et prends du plaisir à jouer ».

Idem pour les devoirs. Il a tendance à s'agacer quand il ne comprends pas. Alors je lui raconte souvent l'anecdote suivante. Je lui dis : «  tu sais, tu n'as pas marché du premier coup. Mais tu ne t'en rappelais plus, mon chat. Mais je vais te dire toutes les étapes. D'abord, tu étais allongé. Après, tu t'es mis à quatre pattes. Et de quatre pattes, tu as compris que tu pouvais poser tes mains sur une table et te mettre debout. Incroyable ».
Et je lui montre toutes les vidéos. Parce que j'ai des albums de lui de zéro à un an, un an à deux ans, deux ans à trois ans. Et je lui montre. Et je lui dis, regarde, les premiers pas, tu n'as pas marché. Tu es tombé. Et regarde, tu t'es relevé. Tu as recommencé. Donc, c'est ça, en fait, la vie. On ne marche pas du premier coup.

Et je lui dis, pour la lecture, ce sera pareil. Tu ne vas pas lire du premier coup. Ça va être laborieux. Mais on va le faire avec le plaisir. Mais la finalité, c'est que tu vas y arriver. Mais on va le faire et ça prendra le temps que ça prendra. Et du coup, j'aimerais lui, voilà, ne pas lui mettre un objectif. » 

Quelle leçon as-tu tirée de l'anecdote du toboggan sur la  « temporalité » des enfants, et pourquoi préfères-tu cultiver le plaisir plutôt que la performance ?

« Je raconte cette anecdote parce que je pense que j'ai été bercé par des objectifs trop hauts pour moi. Et un jour, j'ai peut-être compris ça à ce moment-là, encore une fois, sur une anecdote bête. Mon fils devait avoir un an et demi ou deux ans. Et on va faire du toboggan en bas de chez mes parents, dans un petit parc à côté de la mairie. Et mon fils est de base très peureux. Il aime bien observer. Et il y a deux ans encore plus. Et il n'avait pas fait beaucoup de toboggan. Il monte sur le toboggan, puis il attend. Il prend son temps. Et mon père fait : « bon, allez, on y va ». Et donc, nous, on l'encourage. On dit : « allez, si tu veux, on y va à trois ». Et mon père fait : « oui, allez, on y va à trois. Un, deux... » et à deux, il le pousse. Et là, je n'ai eu aucun mot. Mais intérieurement, ça m'a fait vivre quelque chose.

Et donc, j'en ai parlé à la psy, pour qu'elle m'explique parce que je ne comprenais pas ma réaction. Car, oui, je n'ai rien dit. J'étais fermé comme une huitre. Il y a quelque chose en moi qui m'a ulcéré, mais je ne savais pas quoi dire.

Il y a ce truc de performance. D'aller plus vite que la moyenne, d'aller plus vite que les autres, d'être toujours plus, plus, plus et de ne pas laisser le temps. Et tu te rends compte qu'avec un enfant, la temporalité est totalement différente. Et nous, on essaye d'imposer notre temporalité à un enfant, alors que ça doit être l'inverse. On doit s'adapter à sa temporalité au maximum. Bien sûr que parfois, on ne peut pas forcément tout le temps, mais si tu fais ça, tu verras que ça va être plus fluide, plus cool. 

Et j'ai donc compris que je ne veux pas l'amener à la performance, mais au plaisir du quotidien.

et que ce chemin, j'espère que ça l'emmènera le plus loin possible, d'être le plus heureux possible, épanoui avec ses hauts et ses bas, mais dans cette fenêtre de tolérance où il pourra se régaler là-dedans. »

être un bon parent : comprendre et respecter la temporalité de l'enfant

Un album pour comprendre la temporalité de l’enfant

Comment travailles-tu ta propre régulation émotionnelle pour pouvoir accueillir celles de ton fils et lui offrir une « safe place » ?

« Je dis souvent cette phrase : comment on peut aider un enfant à réguler ses émotions si nous-mêmes, on n'arrive pas à le faire ?

Et on le voit, et ça rejoint à la violence éducative ordinaire. Donc, que tu aies des pics de colère et que t'en prennes conscience et que tu essayes de les travailler, c'est super. Mais il y a des gens, ils continuent. Et ça flingue des gamins. Mais quand je dis, ça flingue des gamins, et tu ne te rends pas compte parce que c'est ton enfant. Et le pire, c'est que ton enfant, il voit son père ou sa mère comme ça, mais il aime ses parents. Et il pense que l'amour, c'est ça. Du coup, qu'est-ce qui va se passer dans les reproductions ? Quand il va rencontrer quelqu'un, possiblement, il va aller très rapidement vers quelqu'un de narcissique, qui va lui faire mal parce que pour lui, l'amour, c'est ça. Parce que toute son enfance, on lui a gueulé dessus en disant que ce n'était pas une bonne personne.

Du coup, déjà, si tu es bien avec toi, forcément, tu vas être bien avec l'autre. Et tu vas être bien avec ton enfant, tu vas être bien avec les personnes. Et prendre du temps pour soi, on en parle souvent, quand tu es parent. On te dit : il faut prendre du temps, c'est essentiel. Et quand on le fait, on a l'impression de culpabiliser, de se dire : « ah, mais non, je vais quand même pas prendre deux heures pour aller faire un spa ou aller faire du sport, alors que... » Bah si, parce que si tu fais ce temps-là, et que tu es bien avec toi, après, tu vas être super bien avec ton enfant. 

Et c'est ça, donc ça fait partie, du global de la santé mentale. Trop souvent, on dit : « mais si mon fils est bien, je suis bien ». Faux. C'est faux !
C'est faux, parce qu'un jour, il ne va pas aller bien, et du coup, toi, tu ne vas pas aller bien. Et ça, ce n'est pas bon. Si tu sais être bien par toi-même, alors quand lui ne sera pas bien, toi, tu seras bien quand même et tu sauras l'accompagner.

Et la fonction de parent, elle est basique, c'est protéger et rassurer son enfant. Donc, soyons le plus protecteur déjà avec nous-mêmes, et rassurant avec nous-mêmes pour pouvoir l'être avec son enfant. C'est ce qui leur permettra d'avoir des bases et d'être dans une safe place, où ils pourront exprimer tout ce qu'ils ont à exprimer, le bien comme le mal.

Mon fils est rentré en CP (septembre 2025) et je me dis : « mais c'est incroyable, il va passer 4 jours par semaine, de 8 h 30 à 17h, tu vas t'imaginer 8h de suite avec des gens que tu ne connais pas. Émotionnellement, il doit se passer plein de choses ». Du coup, s'il a envie de péter une pile, il pète une pile. Et moi, je lui dis que je vais l'aimer toute ma vie, ça ne changera jamais. Mais au moins, je l'autorise à lâcher, à m'expliquer ce qui se passe, et on va essayer de réguler ça pour que, petit à petit, s'il a d'autres débordements émotionnels, il arrive à les remettre dans sa fenêtre de tolérance, et puisse vivre sereinement toutes ses émotions. »

De quelle manière le fait d’emmener ton fils en tournée nourrit-il votre lien et cette « boîte à souvenirs » dont tu parles ?

« Je ne peux effectivement pas tourner seulement une semaine sur deux. Donc, il est avec moi. Il y a toujours une nounou pour s'occuper de lui quand je joue. Et puis surtout, ça nous fait voyager. C'est quand même incroyable.

Un week-end sur deux, on découvre des villes. On découvre des endroits. Il était là quand j'ai joué à Biarritz. Là, on va aller à Lille. Voilà, on profite. En fait, le spectacle ne dure qu'une heure et quart. Et on a toute la journée pour profiter ensemble. On voyage. On lit. Dans le train, on fait des jeux. Et donc, ça crée du lien, en fait.

Je lui dis souvent, il faut remplir notre boîte à souvenirs. Parce que parfois, je lui dis « viens, on fait une petite photo ». Il me répond : « ah non, papa, tu saoules ». Je lui dis, : « mon chat, c'est pour ma petite boîte à souvenirs à moi. C'est trop important ». »

Être un bon parent, n'est-ce pas d’abord apprendre à se connaître soi-même ?

Pour Jérémy Charbonnel, être un bon parent ne commence pas avec son enfant, mais avec soi-même, et notamment avec son enfant intérieur. Il le dit sans détours : on ne peut pas accompagner un enfant dans ses émotions si l’on ne sait pas d’abord accueillir les siennes. Apprendre à se connaître, à comprendre ses blessures d’enfance, à se pardonner aussi, c’est ce qui permet d’offrir une base solide et sécurisante à son enfant.

Être un bon parent, c’est protéger et rassurer, mais aussi apprendre à lâcher prise. C’est accepter de ne pas tout maîtriser, de rater parfois, et de recommencer. C’est privilégier le chemin plutôt que la performance, le plaisir plutôt que la perfection. Et parce que le parent sert d’exemple à son enfant, ces apprentissages deviennent autant de repères transmis, pour qu’il avance le plus sereinement possible dans la vie.

Dans son rôle de père comme sur scène, Jérémy Charbonnel incarne une parentalité sincère, faite d’humour et d’humanité. Une façon de rappeler que le plus beau cadeau qu’un parent puisse offrir à son enfant, c’est d’être bien avec lui-même.

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